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Le Syndicat national de l’enseignement supérieur en ostéopathie (Sneso) a lancé, mardi 5 juin, un référentiel de formation, intitulé « Devenir ostéopathe, agir avec compétence », signé Jacques Tardif, professeur à l’université de Sherbrooke. « Je souhaite que cet outil devienne une référence dans la formation au métier d’ostéopathe, explique Patrick Féval, président du Sneso, qui compte six écoles. Ce référentiel « veut servir de référence à une législation plus rigoureuse garantissant la qualité des soins, la sécurité du patient et un exercice professionnel pérenne », indique M. Féval.
Sur les 74 écoles en France préparant au métier d’ostéopathe, « une quinzaine d’établissements seulement forment des praticiens sérieux », indique Philippe Sterlingot, président du Syndicat français des ostéopathes (SFDO), qui a participé à la rédaction de ce document, fruit de plusieurs années de travail. Selon M. Sterlingot, environ 3 000 jeunes sortent chaque année des écoles d’ostéopathie, qui accueillent 11 000 personnes. A titre de comparaison, il existe dix écoles au Royaume-Uni. « On est arrivé à saturation », note M. Sterlingot, qui estime qu’il faut« faire le ménage » pour ne pas entacher l’image de l’ostéopathie, qui jouit encore d’un réel engouement du grand public. En effet, près de 20 millions de Français ont déjà consulté un ostéopathe au cours de leur vie.
Ce référentiel est en quelque sorte une réponse au rapport de l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) intitulé « Le dispositif de formation à l’ostéopathie », rendu public jeudi 3 mai. Ce rapport de Michel Duraffourg et Michel Vernerey, membres de l’IGAS, dresse un constat sévère et pointe des dysfonctionnements, notamment un dispositif d’agrément des écoles insuffisamment exigeant. Cette procédure est en effet jugée par l’IGAS « mal organisée, insuffisamment précise et de faible qualité juridique ». Les contrôles effectués montrent « la disparité des formations et met en relief la faible qualité de certaines écoles ». L’IGAS critique une augmentation considérable du nombre d’établissements et d’agréments délivrés faisant suite à des recours gracieux. D’où une grande hétérogénéité des formations, souvent assorties de frais d’études élevés, entre 7 000 et 8 000 euros par an. La prolifération des écoles va conduire, selon le rapport de l’IGAS, à mettre sur le marché d’ici à 2015 plus d’ostéopathes qu’il en existe aujourd’hui sur tout le territoire. Au total, on évalue aujourd’hui à environ 17 500 le nombre actuel d’ostéopathes en France.
UNE FORMATION D’UN MINIMUM DE 4 465 HEURES
Parmi ses 18 recommandations, l’IGAS exige une réforme rapide de la procédure d’agrément, ce qui pourrait impliquer la fermeture de certaines écoles. Reste à savoir ce qu’il adviendrait des étudiants. Pour l’IGAS, « il n’est pas raisonnable que le ministre chargé de la santé soit amené à cautionner des pratiques dont les fondements ne correspondent pas aux données acquises de la science ». L’IGAS note en effet les manques en termes de formation pratique des étudiants et préconise de fixer un nombre minimal d’heures dans ce domaine. Le référentiel du Sneso prône une formation d’un minimum de 4 465 heures, dont 1 000 heures de pratique clinique encadrée, comme le recommande l’Organisation mondiale de la Santé (OMS).
« Tout au long de ce rapport, on a déploré les insuffisances de la réglementation actuelle, ses ambiguïtés et son manque de précision », soulignent les auteurs du rapport. La profession a été reconnue par la loi Kouchner de 2002 et ses décrets d’application de 2007. Mais aujourd’hui, la durée de la formation est très hétérogène, et varie de trois à six ans. L’IGAS recommande également que ce soient les pouvoirs publics qui assurent eux-mêmes la reconnaissance des diplômes universitaires ouvrant droit à l’usage professionnel du titre d’ostéopathe. Les organisations syndicales font pression depuis 2007 sur le gouvernement pour clarifier la réglementation. En vain. Ce sera l’un des nombreux dossiers que le nouveau ministère de la santé devra traiter.
Pascale Santi